- FIÈVRE
- FIÈVREFIÈVREAugmentation de la température corporelle; elle apparaît dans de nombreuses manifestations pathologiques et doit être distinguée de l’élévation de la température due à l’effort, qui disparaît en quelques minutes. Le mécanisme de la fièvre, encore mal précisé, associe une élévation de la thermogenèse et une diminution de la déperdition de chaleur.Le facteur commun de toutes les affections fébriles pourrait être une lésion des tissus, et notamment des leucocytes polynucléaires qui semblent sécréter une ou plusieurs substances pyrogènes.Son importance en tant que signe diagnostique n’est plus à souligner, mais elle peut entraîner ses propres manifestations défavorables, notamment la déshydratation, voire la mort si elle dépasse 42 0C (température rectale); c’est pourquoi, à titre symptomatique, il est souvent préférable de la faire baisser par l’administration d’acide acétylsalicylique ou par des enveloppements tièdes ou froids, selon les cas, sans oublier la réhydratation éventuelle du malade.• 1155; lat. febris1 ♦ Élévation anormale de la température du corps (en médecine, supérieure à 38 °C ⇒ hyperthermie). Avoir de la fièvre, un accès, une poussée de fièvre. ⇒ température; fébrile, subfébrile. « Il passait son temps à trembler, claquant des dents, disant qu'il avait la fièvre » (Hugo). La fièvre monte. Une grosse, une forte fièvre. Loc. fam. Une fièvre de cheval, très forte. Yeux brillants de fièvre. ⇒ fiévreux. Fièvre erratique, périodique, rémittente. Médicaments pour faire baisser, tomber la fièvre. ⇒ antipyrétique, fébrifuge. Chute de la fièvre. ⇒ défervescence. — Fam. Bouton de fièvre : vésicule d'herpès sur la lèvre.2 ♦ Par ext. Maladie fébrile. ⇒ pyrexie. Fièvres cérébrales (méningite). Fièvre de croissance (vieilli). ⇒ ostéomyélite. Fièvres exanthématiques. Fièvre typhoïde. Fièvre de Malte. ⇒ brucellose. Fièvre jaune : maladie infectieuse virale, endémique (mais susceptible de provoquer des épidémies) dans les régions tropicales. ⇒ vomito negro; aussi aédès; amaril. Fièvre quarte, forme de paludisme. Au plur. Les fièvres : le paludisme. — Fièvre aphteuse.3 ♦ Fig. Vive agitation, état passionné. ⇒ agitation, éréthisme, exaltation, excitation, fébrilité. Discuter avec fièvre. ⇒ animation, chaleur, 1. feu, passion. La fièvre des sens. La fièvre du départ. « Agitation, émotion, fièvre universelle » (Michelet). Dans la fièvre d'une campagne électorale. La ville était en fièvre.♢ FIÈVRE DE (et inf.) :désir ardent. ⇒ fringale, passion. « Quelle est cette fièvre d'écrire qui me prend, aujourd'hui ? » (F. Mauriac).Synonymes :- température (familier)État d'agitation, de surexcitation ; fébrilitéSynonymes :- fébrilité- fougue- frénésie- nervositéManie, désir ardent de quelque choseSynonymes :- amour- folie- passion- rage- soifFièvre de MalteSynonymes :fièvren. f.d1./d élévation de la température centrale du corps, symptôme de nombreuses maladies (infectieuses, allergiques, inflammatoires, tumorales) s'accompagnant en général d'une accélération du pouls et de la respiration, d'une sécheresse de la bouche et d'une diminution des urines. (L'évolution spontanée de la fièvre est spécifique de diverses maladies auxquelles elle a donné son nom: fièvre typhoïde, fièvre de Malte, fièvre jaune, fièvre bilieuse, fièvres virales hémorragiques.) Syn. hyperthermie.— MED Fièvre de Lassa: maladie virale des rongeurs sévissant en Afrique occid., qui peut être transmise à l'homme par des aliments contaminés par l'urine de ces animaux.— MED, MED VET Fièvre de la vallée du Rift: maladie due à un arbovirus qui atteint surtout les ovins et les caprins et peut provoquer, chez l'homme, des fièvres violentes mais bénignes.d2./d Fig. Agitation provoquée par la passion. La fièvre du combat. La fièvre politique.⇒FIÈVRE, subst. fém.A.— 1. État morbide caractérisé par l'élévation de la température du corps et divers troubles physiologiques (accélération du rythme cardiaque et respiratoire, troubles nerveux). Avoir la fièvre (vieilli); prendre, reprendre la fièvre; un mouvement de fièvre (vieilli); un accès, une poussée de fièvre. Le feu de la fièvre circule dans mes veines (SAND, Lélia, 1833, p. 251). Une fièvre violente l'avait retenu dans Rome, où il avait été obligé de garder le lit toute la semaine (STENDHAL, Abbesse Castro, 1839, p. 177). Il faudra savoir ensuite comment le quinquina peut guérir la fièvre; il n'agit pas sur la fièvre, mais sur une condition physico-chimique (BERNARD, Principes méd. exp., 1878, p. 283) :• 1. — Combien?— 37,5. Elle a vomi son biberon de quatre heures.— Température rectale? Ce n'est pas la fièvre, surtout le soir.— C'est la fièvre, le docteur Chatard l'a dit.— Mais non, il voulait parler de la température prise sous le bras.— Et moi, je te dis que c'est la fièvre. Peu de chose, bien sûr. Mais enfin, c'est la fièvre.MAURIAC, Myst. Frontenac, 1933, p. 175.♦ Expr. Sentir la fièvre (fam.). Répandre une odeur légèrement nauséabonde, caractéristique de l'état fiévreux. Ils sont moites, ils sentent la fièvre (SARTRE, Mouches, 1943, III, 1, p. 86). Tomber de fièvre en chaud mal (au fig., vieilli). V. chaud I B 2.— Spéc. Élévation pathologique de la température du corps au-dessus de la normale chez l'homme et l'animal. Avoir de la fièvre, 40 degrés de fièvre, beaucoup de fièvre. (Quasi-)synon. température (fam.), hyperthermie (en méd.). La fièvre était montée d'un seul coup à quarante degrés, le malade délirait sans arrêt (CAMUS, Peste, 1947, p. 1232). Zaza était très malade; elle avait une grosse fièvre, et d'affreux maux de tête (BEAUVOIR, Mém. j. fille, 1958, p. 357).♦ Fièvre de cheval (v. ce mot B 1).SYNT. a) Trembler, grelotter la fièvre (vieilli); brûler, trembler de fièvre, mourir de fièvre. b) La fièvre s'allume (vieilli), se calme, se déclare, diminue, empire, passe, tombe, retombe; la fièvre brûle, dévore, mine, ronge qqn. c) Fièvre ardente, élevée, faible, intense, modérée, vive; forte, mauvaise fièvre.Rem. On relève ds la docum. qq. attest. du syntagme de fièvre en fonction de déterm. au sens de fiévreux. J'ai la tête en feu, des mains de fièvre (ESTAUNIÉ, Vie secrète, 1908, p. 342).2. Vieilli. [Gén. suivi d'un déterm.] Maladie accompagnée de fièvre. La fièvre, qui tue un enfant sur trois, décime régulièrement les familles (ABOUT, Grèce, 1854, p. 67). En quatre jours cependant, la fièvre fit quatre bonds surprenants : Seize morts, vingt-quatre, vingt-huit et trente-deux (CAMUS, Peste, 1947 p. 1266).a) MÉDECINE— [Le déterm. désigne l'organe où se produisent les troubles] Fièvre cérébrale, muqueuse.— [Le déterm. désigne l'origine du trouble] Fièvre de Malte, des marais; fièvre inflammatoire, paludéenne, puerpérale, traumatique; fièvre charbonneuse (v. charbon2), typhoïde; fièvre de croissance, de lait.— [Le déterm. spécifie une manifestation du trouble] Fièvre hectique, intermittente, lente, ondulante, oscillante, quarte, récurrente, tierce; fièvre d'accès (v. accès2), en plateau; fièvre aphteuse, boutonneuse, éruptive, miliaire; fièvre jaune, pourpre, rouge; fièvre putride; fièvre chaude, froide.b) Spéc., au plur. Paludisme. Avoir, attraper, prendre les fièvres; fièvres tropicales. Les fièvres sont dans le delta, et les ophtalmies n'attaquent guère que les Arabes (FLAUB., Corresp., 1849, p. 135). En 1904, à Cherbourg, officier de marine et déjà rongé par les fièvres de Cochinchine, il fit la connaissance d'Anne-Marie Schweitzer (SARTRE, Mots, 1964, p. 8).B.— Au fig.1. Dans le domaine psychol.a) Absolument— État émotif d'inquiétude et de tension anxieuse. J'étais dans le grand salon noir occupé à fumer une cigarette, pour tromper ma fièvre (JOUVE, Scène capit., 1935, p. 211) :• 2. Lorsqu'on doit voir le soir la femme qu'on aime, l'attente d'un si grand bonheur rend insupportable tous les moments qui en séparent. Une fièvre dévorante fait prendre et quitter vingt occupations. L'on regarde sa montre à chaque instant, et l'on est ravi quand on voit qu'on a pu faire passer dix minutes sans la regarder...STENDHAL, Amour, 1822, p. 58.♦ Avec fièvre. Decraemer, qui d'habitude voyait venir le soir comme une agonie, attendit ce jour-là la nuit avec fièvre. Enfin le gardien fit sa dernière ronde (VAN DER MEERSCH, Invas. 14, 1935, p. 286).— État psychologique d'exaltation et/ou d'agitation passionnée. Moment de fièvre; travailler dans la fièvre. (Quasi-)synon. fébrilité. Je songe à cette heureuse fièvre qui, tout le temps que j'écrivais Paludes, maintenait mon livre en éveil (GIDE, Journal, 1905, p. 185). Tu as des rêves et des fièvres, D'obscurs désirs de merveilleux (ACHARD, Voulez-vous jouer, 1924, II, 2, p. 141) :• 3. Rubens fait de la touche le témoignage où s'inscrit le geste créateur; elle devient graphique irrécusable de la force et de la fièvre dont elle résulte. La composition aussi est jetée dans la sarabande : elle était l'architecture des lignes et reposait sur elles; désormais elles l'entraînent; elles deviennent lignes de force, résultantes de poussées diverses, comme les courants des océans, directions irrésistibles qui se propagent à travers la toile...HUYGHE, Dialog. avec visible, 1955, p. 152.♦ Avec fièvre. Écrire avec fièvre, avec allégresse, à bride abattue, quelle coupable folie! (COLETTE, Jumelle, 1938, p. 248).— Vieilli. [Avec un déterm. adj. ou subst. spécifiant la nature de l'exaltation] Fièvre nerveuse, spirituelle; fièvre de tête. Les fièvres de l'âme sont semblables à celles du corps : pour les guérir il faut surtout changer de lieux (CHATEAUBR., Martyrs, t. 2, 1810, p. 108). Elle était très calme et très heureuse, sans une fièvre de la chair ni du cœur (ZOLA, Page amour, 1878, p. 848).b) [Constr. avec un compl. prép. de (ou un adj.) désignant la cause] État de trouble psychologique.— [Le compl. désigne un affect] Toutes les impérieuses fièvres du désir se réveillèrent dans les veines de Rodolphe (MURGER, Scènes vie boh., 1851, p. 162). Comment expliquer cette poussée de fièvre érotique chez des pestiférés guéris (ARTAUD, Théâtre et double, 1938, p. 30) :• 4. Il était possédé par elle. Rien ne le touchait plus qui n'était pas Carlotta. Et en même temps il se sentait pris d'une fièvre de frayeur. Sans argent, il allait la perdre. Des diamants dansaient dans sa tête, et une confuse peur de l'avenir.ARAGON, Beaux quart., 1936, p. 417.SYNT. Fièvre de crainte, d'impatience, d'inquiétude, d'espérance; fièvre amoureuse, patriotique, poétique.— [Le compl. désigne un événement] L'homme passionné, blessé, pris par la fièvre de l'intérêt en danger, et douloureusement atteint dans sa vie (BALZAC, C. Birotteau, 1837, p. 252). « Elle » était invitée sur un yacht, pour une longue croisière, et vivait dans la fièvre des essayages (MAURIAC, Myst. Frontenac, 1933, p. 235).c) [Fièvre est défini et construit avec un compl. prép. de; correspond à fiévreux B 1
] Caractère fiévreux de. Que l'orgueil de notre luxe et la fièvre de nos voluptés ne nous fassent pas illusion (PROUDHON, Guerre et paix, 1861, p. 327). C'est (...) à l'énergie de ses convictions, à la fièvre de ses haines (...) que l'Ami du Peuple doit la vie qui éclate encore dans celles de ses pages dont nous conservons le fil conducteur (THIBAUDET, Hist. litt., 1936, p. 14) :
• 5. J'ai ce don (...) d'allier, dans le même instant, deux états aussi différents, aussi opposés, que la passion et la lucidité; la fièvre, le délire du lyrisme intérieur, et la froide raison...MARTIN DU G., Notes Gide, 1951, p. 1406.— [Le compl. désigne une partie du corps, un comportement] Il parlait vite, sur un ton saccadé, dont la fièvre était contagieuse (MARTIN DU G., Thib., Été 14, 1936, p. 547). La sueur qui ruisselait sur ses joues, la fièvre inquiète de ses yeux me mettaient mal à l'aise (BEAUVOIR, Mandarins, 1954, p. 215).Rem. On relève ds la docum. une attest. d'un emploi partitif fig. Il y avait dans leur amour de la fièvre et de la lâcheté (DANIEL-ROPS, Mort, 1934, p. 174).d) [Constr. avec un compl. prép. de désignant l'obj. d'un désir] Désir ardent, manie de. Fièvre du gain, de savoir. Synon. folie, passion, rage, soif de. Il étudia les langues, le latin, le grec, l'hébreu (...). C'était une véritable fièvre d'acquérir et de thésauriser en fait de science (HUGO, N.-D. Paris, 1832, p. 173). Un caprice de sens pareil à ceux que les femmes mariées éprouvent pour leurs maris lorsqu'elles ont la fièvre d'un cachemire (MURGER, Scènes vie boh., 1851, p. 159) :• 6. On voit certains hommes répondre aux excès de la civilisation sédentaire par de vives réactions de la conduite, qui parfois se cristallisent en mouvements collectifs ou en manies solitaires : impulsions de marche, goût romantique de la nature, fièvre des voyages et des départs, instabilité professionnelle ou du domicile, passion de l'aventure et de la guerre.MOUNIER, Traité caract., 1946, p. 83.Rem. Rare. Fièvre à + inf. Ce n'est pas que la liberté même se révèle si tentante, et je n'en veux pour preuve que ma fièvre à changer de place (COLETTE, Cl. s'en va, 1903, p. 264).2. P. anal.a) Absol. Atmosphère, état collectif d'agitation et/ou de surexcitation. Ville en fièvre. (Quasi-)synon. effervescence. Il s'aperçut qu'il devenait médiocre : il faut cette fièvre de Paris, qui est dans l'air et qui vous saisit au saut du lit (CHAMPFL., Avent. Mlle Mariette, 1853, p. 109). La fièvre (...) régnait dans ces bureaux surpeuplés où l'ardeur suppléait à la routine (ABELLIO, Pacifiques, 1946, p. 412).— [Avec un déterm. adj. ou subst. spécifiant la nature de l'agitation] Fièvre des esprits; fièvre religieuse, révolutionnaire. C'est un des pires crimes de Vichy que d'avoir excité les fièvres politiques et répandu le défaitisme parmi nous (AMBRIÈRE, Gdes vac., 1946, p. 136).— [Constr. avec un compl. prép. introd. par de désignant la cause] Les passions excitées par la fièvre annuelle des élections (MAINE DE BIRAN, Journal, 1818, p. 180).b) [Constr. gén. avec un compl. prép. de désignant l'objet d'un désir coll.]— Vieilli. Mouvement d'opinion. (Quasi-)synon. vogue. Une fièvre passagère d'anglomanie (SAINTE-BEUVE, Prem. lundis, t. 1, 1869, p. 302). Il n'y eut aucune fièvre cocardière, aucun cri guerrier (AMBRIÈRE, Gdes vac., 1946 p. 120) :• 7. Une agitation anti-royaliste, l'expulsion des Princes et bientôt la fièvre boulangiste lui ôtèrent [à Édouard VII] la confiance qu'il avait commencé d'avoir en la sagesse de la jeune République française.MAUROIS, Edouard VII, 1933, p. 75.— Vif engouement pour. Les agents capables d'anticipations créatrices sont stimulés et entraînés. Soit à propos d'une série déterminée d'opérations, pendant une période relativement courte; c'est la « fièvre des canaux », la « fièvre des chemins de fer », la « fièvre de l'or » (PERROUX, Écon. XXe s., 1964, p. 148) :• 8. C'est la paix.Non. Non. Non (...) c'est l'or.C'est l'or.Le rush,La fièvre de l'or qui s'abat sur le monde,La grande ruée de 1848, 49, 50, 51 et qui durera quinze ans.CENDRARS, Or, 1925, p. 117.♦ Fièvre obsidionale. Psychose collective frappant une population assiégée. La fièvre obsidionale, qui travaillait alors l'Angleterre, y faisait foisonner les organes de renseignements et de sécurité (DE GAULLE, Mém. guerre, 1954, p. 124).Rem. On relève ds la docum. qq. attest. de la constr. une fièvre de + subst. plur. avec un sens quantitatif. Le maire s'expliquait, avec toute une fièvre de gestes et de paroles (ZOLA, Conquête Plassans, 1874, p. 934). L'annonce [de grandes cérémonies] suscitait des semaines à l'avance une fièvre de commentaires et de préparatifs (AMBRIÈRE, op. cit., p. 160).Prononc. et Orth. :[]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1155 pathol. (WACE, Brut, éd. I. Arnold, 14194 : Malade fud de fievre ague); 1306 fig. « état d'agitation » (G. GUIART, Royaux Lignages, II, 7744, ibid.); 1793 fievre de + nom ou inf. « désir ardent de » (LAYA, Ami loix, p. 71 : la fievre des honneurs, des rangs et des succès). Du lat. class. febris. Fréq. abs. littér. :4 348. Fréq. rel. littér. :XIXe s. : a) 4 634, b) 7 684; XXe s. : a) 8 531, b) 5 288. Bbg. LEW. 1960, p. 112, 113, 117. — POHL (J.). Contribution à l'hist. de qq. mots. Arch. St. n. Spr. 1969, t. 205, p. 364, 370. — QUEM. DDL t. 2, 8, 9.
fièvre [fjɛvʀ] n. f.ÉTYM. V. 1190, « surexcitation »; du lat. febris.❖1 (XIIIe). Élévation anormale de la température du corps (en méd., estimée au-dessus de 38 °C; syn. sav. : hyperthermie). ⇒ Pyréto-; pyrétique. || Avoir de la fièvre, un accès (cit. 9), une poussée de fièvre. ⇒ Fébricitant, fébrile; fébrilité, température. || Sentir de la fièvre, un peu de fièvre. — Avoir la fièvre. || La fièvre le travaille (→ Affecter, cit. 3). || Les frissons, symptôme avant-coureur de la fièvre. || Transpiration irrégulière, sensation de soif accompagnant la fièvre. || La fièvre est à son premier stade, elle monte régulièrement, elle se ranime (→ Aggraver, cit. 7). || Le fort, le paroxysme de la fièvre. || Ce n'est qu'une petite fièvre bénigne, légère. || Une bonne (cit. 30), une grosse, une forte fièvre. — ☑ Loc. fam. Une fièvre de cheval. — Fièvre accompagnée de délire. || Ardeur (cit. 2), chaleur, feu de la fièvre. || Fièvre ardente, brûlante, dépressive, qui consume (cit. 10) un malade (→ Attaquer, cit. 43; assoupir, cit. 2; brûler, cit. 23; brûlure, cit. 4). || Alangui (cit. 5), abattu, miné par la fièvre. || Yeux brillants de fièvre. ⇒ Fiévreux. || Brûler (cit. 39), bouillir de fièvre. || Trembler de fièvre. — Vx. || Grelotter la fièvre (Académie). — Fièvre larvée, lente. || Thermomètre, feuille, courbe de température pour suivre l'évolution de la fièvre. || Fièvre continue, dans laquelle la température ne présente que de légères variations. ⇒ Continent. || Stade amphibole d'une fièvre continue, caractérisé par une température très élevée le soir. || Fièvre erratique, périodique. ⇒ Intermittent, rémittent; double, quarte, tierce. || Accès de fièvre subintrant. || Couper (cit. 25.6), faire baisser, tomber la fièvre au moyen de médicaments (⇒ Antifébrile, antipyrétique, antithermique, fébrifuge), de bains ou d'enveloppements froids, par sudation. || Diminution de la fièvre. ⇒ Défervescence. || Absence de fièvre, rémission de la fièvre. ⇒ Apyrexie.REM. Les expressions techniques anciennes fièvre tierce, fièvre quarte, s'entendent à la fois au sens de symptôme fébrile et de maladie qui les cause (→ ci-dessous, cit. 1, 5.1 et supra); c'est le symptôme fébrile qui se manifeste tous les trois, quatre jours.1 En attendant que de mes veines parteCette exécrable, horrible fièvre quarteQui me consomme et le corps et le cœur,Et me fait vivre en extrême langueur.Ronsard, Premier livre des Poèmes, « La salade ».2 (…) quel est ce principe secret qui se développe à des heures réglées dans des fièvres intermittentes, quel est ce poison interne qui se renouvelle après un jour de relâche, où est ce foyer qui s'éteint et se rallume à des moments marqués. Il semble que toutes les causes soient faites pour être ignorées. On sait à peu près qu'on aura la fièvre après des excès, ou dans l'intempérie des saisons; on sait que le quinquina pris à propos la guérira : c'est bien assez; on ignore le comment.Voltaire, Dict. philosophique, Fièvre.3 Ou bien il passait son temps à trembler, claquant des dents, disant qu'il avait la fièvre, et s'informant si l'un des vingt-huit lits de la salle des fièvreux était vacant.Hugo, les Misérables, IV, II, II.4 La fièvre, qui m'avait brusquement envahi, me donnait des inquiétudes. Je ne tenais pas en place et je sentais une petite flamme sèche, dans le creux de mes mains, quand je les crispais nerveusement. Une subtile courbature peu à peu montait de mes jambes dans mes reins. Déjà elle touchait à la pointe des épaules. Des frissons se glissaient dans mon dos, en zigzaguant; une grande amertume emplissait ma bouche; mes yeux devenaient lourds; mes oreilles bourdonnaient, et je sentais comme une main qui me pressait la nuque.H. Bosco, le Jardin d'Hyacinthe, p. 208.5 (…) les hyperthermies résultant d'une intoxication par des substances de nature protéidique qui provoquent un trouble humoral aboutissent au symptôme clinique désigné sous le nom de fièvre (…) On peut subdiviser (…) les fièvres en deux catégories : les unes, fièvres septiques, sont de beaucoup les plus fréquentes, elles résultent de l'intoxication de l'organisme par des poisons microbiens. Les autres, dites fièvres aseptiques, sont provoquées par l'introduction de protéines étrangères (…) la fièvre, lorsqu'elle n'atteint pas un niveau excessif par lui-même, doit être respectée car elle traduit les réactions de défense naturelle de l'organisme.R. Fabre et G. Rougier, Physiologie médicale, p. 959-960.♦ Par ext. Maladie fébrile. ⇒ Pyrexie. || Fièvres algides. || Fièvres cérébrales ou (fam.) fièvres chaudes (cit. 5). ⇒ Méningite. || Fièvres éruptives, présentant une éruption cutanée et une évolution cyclique. ⇒ Rougeole, rubéole, scarlatine, varicelle, variole. || Fièvre ondulante, ou fièvre de Malte. ⇒ Brucellose. || Fièvre typhoïde, exanthématique. ⇒ Typhoïde, typhus; pourpré (fièvre pourprée). || Fièvre inflammatoire. || Fièvre hectique. — (1814, Nysten). Cour. || Fièvre jaune : maladie infectieuse virale, endémo-épidémique des régions tropicales, transmise par un moustique (Stegomyia). ⇒ Amaril (typhus), vomito negro. — Fièvre de lait. ⇒ Puerpéral. — Vieilli. || Fièvre de croissance. ⇒ Ostéomyélite. || Fièvre miasmatique. || Fièvre miliaire. ⇒ Suette (miliaire). || Fièvre paludéenne (cit. 2), des marais, ou maremmatique. ⇒ Malaria, paludisme. — (1872). Fam. || Avoir, prendre les fièvres, la fièvre paludéenne. — (1560). || Fièvre tierce, fièvre quarte : formes de paludisme, où la poussée fébrile se manifeste tous les trois, les quatre jours. || Fièvres pernicieuses. || Fièvre récurrente.5.1 Il pouvait se faire que les intermittences ne fussent pas quotidiennes, que la fièvre fût tierce, en un mot, et qu'elle revînt le lendemain. Aussi, ce lendemain, l'attendit-on avec la plus vive anxiété.J. Verne, l'Île mystérieuse, t. II, p. 720.6 Où les marais visqueux et blancs,Dans leurs remous,À longs bras lents,Brassent les fièvres empoisonnées.Verhaeren, les Campagnes hallucinées, « Les fièvres ».6.1 La « fièvre de lait » lui avait émaillé tout le corps de croûtes craquelées noires, grises, jaunes, verdâtres.M. Jouhandeau, la Jeunesse de Théophile, p. 76.➪ tableau Principales maladies et affections.2 (V. 1190). Fig. Vive agitation, état passionné. ⇒ Ardeur, énervement, éréthisme, étourdissement (cit. 7), exaltation (cit. 10), excitation, fébrilité, surexcitation, 2. trouble. || Discuter avec fièvre. ⇒ Animation, chaleur, 1. feu, passion. || Il a parlé sans fièvre et sans passion. || La fièvre des sens (→ Amour, cit. 23; avilir, cit. 25). || Calmer la fièvre des esprits. ⇒ Désordre, impatience. || Fièvre obsidionale. || Une fièvre panique (→ 1. Panique, cit. 3). || Dans la fièvre d'une campagne électorale. || La fièvre du départ. || La ville était en fièvre, avait la fièvre, un accès de fièvre. || Travailler avec fièvre. || Vivre dans la fièvre. || La fièvre créatrice de l'artiste (→ Dessin, cit. 2). || La fièvre du jeu (→ Dépasser, cit. 17).7 Agitation, émotion, fièvre universelle, vaste et général murmure du dehors et du dedans.Michelet, Hist. de la Révolution franç., IV, IX.8 Elle allait donc posséder enfin ces joies de l'amour, cette fièvre du bonheur dont elle avait désespéré.Flaubert, Mme Bovary, II, IX.9 (…) ce furent de ces baisers où l'extase de l'âme en débordant sur tout le corps donne à la fièvre des sens l'ardeur d'un élan spirituel, où le passé, le présent, l'avenir, s'abolissent pour ne plus laisser de place à rien qu'à l'amour, à la douloureuse, à l'enivrante folie de l'amour.Paul Bourget, le Disciple, IV, VI.♦ Fièvre de… : désir ardent de… || La fièvre des conquêtes (→ Agrandissement, cit. 2). — (1855, in D. D. L.). || La fièvre de l'or (1. Or, cit. 2). ⇒ Amour, passion. || Fièvre du gain, de la réussite. — (Avec un inf.). || Il est pris d'une véritable fièvre de collectionner. ⇒ Manie, rage.10 Vous me terrifiez, aussi, avec vos demandes de renvois. Hier, c'était M. Letondu; aujourd'hui, c'est M. Lahrier; quelle est cette fièvre d'expulsion ?Courteline, Messieurs les ronds-de-cuir, IVe tableau, III.11 Quelle est cette fièvre d'écrire qui me prend, aujoud'hui… ?F. Mauriac, le Nœud de vipères, I.♦ État émotif à base d'anxiété. || L'attente des résultats lui donne la fièvre. ⇒ Enfiévrer. || Il en a la fièvre rien que d'y penser.12 Il était douteux, inquiet :Un souffle, une ombre, un rien, tout lui donnait la fièvre.La Fontaine, Fables, II, 14.13 Le froid, l'anxiété, l'inquiétude, les émotions de la soirée, lui donnaient une véritable fièvre, et toutes ces idées s'entre-heurtaient dans son cerveau.Hugo, les Misérables, II, V, VII.♦ Faire quelque chose avec fièvre, fiévreusement.♦ En fièvre. || Ville, pays en fièvre. ⇒ Enfiévré, fiévreux.❖CONTR. (Du sens 1.) Apyrexie, hypothermie. — (Du sens 2.) Calme, froideur, impassibilité, indifférence.DÉR. Fiévreux.COMP. Enfiévrer.
Encyclopédie Universelle. 2012.